[Billet] – Retour sur les critiques envers la mondialisation

Par Marius-Joseph Marchetti,

 

Nous aborderons dans ce billet quelques-uns des avantages et désavantages qui sont généralement pris en exemple lorsqu’on l’en arrive à parler de la mondialisation.

 

Le libre-échange :

 

Tout d’abord, si nous nous référons au cadre du libre-échange même, celui-ci dans un état purement originel, non réglementé, etc … on peut considérer que celui-ci n’est pas « Pareto Optimal », à savoir qu’on ne peut pas améliorer la situation d’un individu sans dégrader celle d’un autre. Il nous faut d’abord nous renseigner sur cet outil méthodologique pour comprendre où réside l’erreur et pourquoi le libre-échange a quand même apporté des avantages consubstantiels à l’humanité. 

 

L’optimum de Pareto, est un des outils de base de l’économie néoclassique, qui se base, philosophiquement, sur la tradition benthamienne du calcul des plaisirs et des peines : c’est à dire l’utilitarisme d’acte ou Act-Utilitarianism. On juge ainsi les actes et non les règles générales, comme le fait Friedrich Hayek à l’inverse (ce que l’on nomme en général Rule-Utilitarianism ou conséquentialisme).

 

“Les thèses du libre-échange sont valables en tant que règles générales dont l’usage commun est généralement bénéfique. Comme toutes les règles générales, il y a des cas particuliers où, si on connaissait toutes les circonstances du moment et toutes les conséquences sur tous les plans, il vaudrait mieux que ces règles ne fussent appliquées. Mais cela n’en fait pas de mauvaises règles, et cela ne justifie par la non-application des règles lorsque, comme c’est normalement le cas, on ne connaît pas toutes les conséquences qui feraient du cas concerné une exception souhaitable.”  A.P. Lerner, “The Backward-Learning Approach to Controls”.

 

C’est le Libre-échange qui procure des bénéfices naturels ; pas les traités commerciaux. Les traités commerciaux, en quelque sorte, sont ici pour rapprocher la situation du commerce international d’un Optimum de Pareto. Or, créer des exceptions à une règle générale, comme dit plus haut, c’est annuler ses bénéfices et finalement nuire aux individus. Les traités incarnent une vision holiste et localisée de l’échange (et en ce sens, il est difficile de ne pas céder aux sirènes qui crient au mondialisme). Ils “segmentent” des parts du monde en favorisant des zones de production au détriment d’autres : via des quota d’importations de lait, de voiture, l’application de normes environnementales, etc …

 

Fondamentalement, le libre-échange et la mondialisation sont le développement logique d’un processus de spécialisation qui a cours depuis aussi longtemps que la vie sociale existe. On pourrait tout aussi bien aller au bout du raisonnement anti libre-échange et dire alors  « pourquoi s’embêter à payer quelqu’un pour produire si je peux le faire moi-même » ? Ainsi, même plus besoin d’avoir un emploi, vu que vous produisez votre subsistance vous-même. Sauf que ce n’est pas ainsi qu’on sort les gens de la pauvreté, c’est même l’inverse. Et nous pouvons faire le même parallèle avec l’avancée de la technologie : Lorsque vous payez quelqu’un pour faire un trou avec une pelle, vous supprimez de l’emploi, car vous pourriez fort bien en employer neuf de plus en leur donnant des cuillères. Ou vous pourriez interdire les trains de marchandises et autres moyens de locomotions : cela vous permettrez d’embaucher des milliers de personnes afin de leur faire porter ses marchandises d’un bout à l’autre du pays. Un emploi n’est pas une fin en soi, ce n’est qu’un moyen pour satisfaire des besoins. On le sait depuis Frédéric Bastiat il y a 160 ans et cette vérité n’a pas changé. C’est grâce à des accumulations successives de capital dans le temps, aidée par des économies de ressources par les processus de spécialisation que le niveau de satisfactions des biens a pu si drastiquement s’élever. Alors non, aussi contre-intuitif que cela puisse être, protéger des emplois ne peut pas élever le niveau de vie général des individus.

 

« S’il était vrai que l’introduction du machinisme soit la cause du chômage et de la misère grandissants, la conclusion logique à en tirer devrait être totalement révolutionnaire. Non seulement en ce qui concerne le domaine technique, mais encore par rapport à notre conception même de la civilisation. Non seulement nous devrions considérer que tout progrès technique nouveau est une calamité, mais il nous faudrait regarder avec la même horreur tous les progrès techniques du passé. «  Henry Hazlitt

 

La confusion autour des implications politiques : 

 

Une autre des critiques faite à l’encontre de la mondialisation est celle de l’uniformisation des peuples et une intégration des processus politiques au niveau mondial. Or ceci à peut à voir avec la mondialisation elle-même.

La confusion entre Mondialisation et Mondialisme nuit à la bonne compréhension de ce qui est effectivement la mondialisation. La mondialisation est un phénomène qui est aussi vieux que le phénomène de coopération sociale puisqu’elle en est la naturelle extension, celle d’individus se spécialisant pour épargner leur ressources en se dévouant à des activités pour lesquelles ils sont le plus productif et en laissant autrui faire ce pour quoi ils sont comparativement moins productifs. On peut effectivement dire que lutter contre la mondialisation, c’est lutter en quelque sorte contre la nature humaine, étant donné que nous pouvons faire un parallèle entre ce qu’est la spécialisation économique permise par la coopération sociale, et la loi de diversification croissante biologique : Plus un organisme, ou un ordre, croît, et plus ses fonctions se spécialisent. La spécialisation, c’est ce que l’être social a trouvé comme moyen pour assurer sa survie et subsistance sans avoir à se faire la guerre. 

 

« Si les marchandises ne franchissent pas la frontière, les soldats le feront. » Frédéric Bastiat

 

Le mondialisme, quant à lui,  est une vue politique qui entend créer un nouvel ordre global, par l’intégration et l’agglomération de politique menées mondialement à l’aide d’une coopération gouvernements-firmes, n’ayant que pour instrument la Pure Raison. Il trouve en général chez ses défenseurs des fondements philosophiques dans le saint-simonisme ou le socialisme fabien, ou encore chez les néo-malthusiens, même si Kant, en défenseur qu’il est du cosmopolitisme, mérite également de figurer sur le banc des accusés. Mais cela mérite un développement ultérieur. 

 

L’argument de l’accroissement des inégalités :

 

L’argument de l’accroissement des inégalités dans le monde revient également de manière récurrente. On pourrait citer nombre de politiques qui empêchent les pays pauvres de se développer. C’est donc bien plus les restrictions au commerce international, et non le commerce international et la mondialisation, qui sont à l’origine de l’incapacité des pays du Tiers-monde à se hisser au niveau de vie des pays occidentaux. Le premier coupable, est la politique protectionniste agricole dont aucun pays ne se prive, pour le plus grand malheur du pouvoir d’achat des masses des pays développés et du développement des pays en situation de retard économique. Cet écart croissant entre riches et pauvres, Nord et Sud, dans les pays en voie de développement, peut également s’expliquer par ce que l’économiste Hernando De Soto appelle le phénomène de “cloche de verre” . Le phénomène de cloche de verre se manifeste par le fait que le système de protection des droits de propriété n’est accessible qu’aux individus riches ayant des liens avec le pouvoir en place. Ils sont sous la « cloche de verre », inaccessible aux communs des mortels, qui possèdent des bien n’étant pas protégés juridiquement. Ces biens sont nommés par De Soto « capital mort », et ne sont pas pris en compte dans les divers calculs macroéconomiques et statistiques du gouvernement, ce qui les rend artificiellement plus pauvres que ceux qu’ils ne sont réellement).

 

Les inégalités libérales des sociétés de production sont agitées d’un brassage permanent et elles sont modifiables à tout instant. Dans les sociétés de redistribution étatique, les inégalités sont au contraire figées et structurelles : quels que soient les efforts et les talents déployés par un actif du secteur privé français, il n’aura jamais les avantages « acquis » (c’est-à-dire octroyés et intouchables) d’un agent d’Électricité de France » Jean-François RevelLa Grande parade

 

Le problème avec les inégalités qui ont cours, c’est que celles-ci gênent lorsque ce n’est pas l’Etat qui en est la cause. Cette manière d’appréhender les inégalités est en adéquation avec ce que défendait John Rawls dans sa Théorie de la Justice, à savoir qu’une répartition trop inégalement importante se doit d’être corrigée par une politique interventionniste, au motif de justice sociale. Or, comme le conteste Robert Nozick, dans Anarchie, Etat, et Utopie, ce n’est pas la répartition mais la manière dont la répartition a été créée qui rend celle-ci juste ou non : on en revient au débat entre ce qu’Aristote appelait la justice distributive et la justice commutative. Et clairement, les principaux problèmes d’inégalités qui caractérisent  les différences Nord-Sud, et plus globalement l’écart entre riches et pauvres, provient, non pas des inégalités de fortune comme telles, mais de facteurs politiques favorisant certaines fortunes au détriment de l’ensemble des individus.

 

Une des choses qui limite à terme l’inégalité riches/pauvres, c’est ce que les mathématiciens appellent la loi exponentielle de croissance des fortunes. Cette fameuse loi limite la croissance des richesses car, du fait de son caractère exponentielle, ne dure qu’un temps, et qu’elle rencontre forcément des obstacles à un moment donné, comme la concurrence de nouvelles firmes dans ce cas-là par exemple (obstacles réduits par l’action du pouvoir : par exemple, avec le sauvetage des banques et le renflouement des portefeuilles d’actions avec l’argent du contribuable lambda). On peut le voir par exemple lorsqu’on voit le classement des grandes fortunes US, qui fluctue énormément, à l’inverse du même classement en France.

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