Par Chuck Noel,
L’Économie c’est avant tout des rapports humains, d’individus exerçant sur un Marché. Dans un Marché libre, l’Homo économicus constitue le graal du système économique. C’estl’individu seul ! qui mène et fait l’ordre économique, c’est d’ailleurs ce qui donne la célèbre « Main invisible » d’Adam Smith.
Cependant, si l’Individu constitue le point « zéro » du Marché, cela ne signifie pas qu’il est nécessairement infaillible. S’il est à même de faire de bons choix, ce ne sont pas toujours les meilleurs. En effet, la complexité de l’esprit humain fait qu’il arrive, parfois de commettre des erreurs de jugement, et ce, sans forcément l’intervention d’une tierce entité. C’est ce que la Psychologie nomme les « biais cognitifs ». Ces derniers n’ont jamais été aussi présent dans l’Économie notamment dans la microéconomie.
Ces biais cognitifs se définiraient comme des erreurs de calculs dans une situation donnée. Souvent involontaires, ces biais sont le fruit de croyances populaires, mais également le fruit de raisonnements fallacieux, trompeurs, qui ne sont rien d’autres que le résultat de la conscience individuelle. Ces derniers permettent de définir un contour quant aux limites de la Raison. Autrement dit, l’Homme étant un être imparfait.
Cette matière, qu’on appelle aussi Économie comportementale, souvent peu exploitée par les courants libéraux, ce qui est très dommage au passage, permet de formuler une critique constructive face aux pensées collectivistes et positivistes. Ces pensées qui fondent leur postulat sur l’incapacité de l’individu de faire seul ses propres choix. Justement, il faut prendre ces « biais de la Raison »comme des synonymes de l’imperfection humaine.
1 –La Théorie des « coûts irrécupérables » : le paradoxe de la dépense gâchée gachée.
Parmi quelqu’un de ces biais on retrouve la théorie des « coûts irrécupérables ». Cette théorie implique qu’une personne investisse par exemple 100 euros pour un voyage, que par la suite le moment venu, la personne soit dans l’impossibilité physique de se rendre au dit voyage, mais qu’à côté en même temps on lui fait une proposition pour aller faire une promenade dans un parc. La problématique que pose cette théorie, est de savoir s’il vaut mieux quand même se rendre au voyage, malgré l’impossibilité physique, car on y a investi 100 euros ? Ou bien aller à cette promenade qui ferait que grand bien à la personne en question ?
Machinalement, la majorité va avoir tendance à prendre le voyage, pensant qu’il ne faille pas gâcher l’argent dépensé. Or, cette argent est justement déjà dépensé et est donc « irrécupérable ». Dans cette hypothèse, le vrai choix rationnel réside dans le choix de la promenade qui apportera bien moins de désagréments que le voyage pour la personne visée. De toute façon l’argent est déjà gâché.
Ce cas d’école, ferait bien sourire s’il n’était que le propre de la microéconomie. Puisque la majorité individus seraient en quelque sorte sur un pied d’égalité dans la commission de cette erreur. Erreur qui pourrait n’être corrigée que par l’expérience.
Néanmoins, cette théorie est facilement transposable en macroéconomie et c’est là que ça devient moins gai. En effet, les politiques publiques notamment en recherche et développement ont souvent été confrontées à cette problématique. Par exemple pour le projet de Concorde dont la France et ses partenaires connaissaient déjà le futur échec cuisant de l’appareil supersonique, mais ont malgré tout décidé de mener le projet à terme alors que les millions de francs investis étaient « irrécupérables ». Au lieu, peut-être, au mieux de rendre l’argent restant au contribuable, le cas échéant le réinvestir dans des projets plus porteurs. C’est en partie la théorie des coûts irrécupérables qui sonna le glas de l’URSS. Le refus de reconnaitre l’échec d’un choix a finit par faire écrouler ce monstre bureaucratique sur lui-même.
Ici, il s’agit de l’argent du contribuable qui est engagé, l’erreur est moins permise dans ce cas. Ce qui démontre dans une certaine mesure à l’État de rectifier ses erreurs -par orgueil-contrairement à un individu qui n’a aucun intérêt de persister dans ce biais cognitif des coûts irrécupérables.
2 –Les 4 façons de dépenser de l’argent : une seule façon celle de l’individu pour l’individu ou/et ses proches.
Ce qui nous revient à parler d’un autre exemple d’Économie comportementale, qui relève moins du biais cognitif, mais de l’idée d’intéressement des individus. Qui n’est rien d’autre les « 4 façons de dépenser de l’argent » selon Milton Friedman.
Ainsi, quand l’argent appartient à un individu et que celui-ci dépense son argent. L’individu raisonnable va y prêter une attention toute particulière à savoir comment il va dépenser l’argent et surtout au montant de la dépense. C’est à dire de la manière la plus optimisée qui soit.
Si l’argent est destiné à un proche de l’individu pour acquérir, un cadeau par exemple. L’individu va prêter attention au montant dépensé mais moins au comment de la dépense. L’individu est moins diligent.
Lorsque l’argent n’appartient pas à l’individu, celui-ci sera moins soucieux du montant de la dépense du moment qu’il en ait pour cet argent. Par exemple, obtenir un repas d’affaire convenable pour la Société dans laquelle il est employé.
Enfin, il s’agit de l’hypothèse la plus importante, et pour cause. Il s’agit de dépenser l’argent de quelqu’un d’autre au profit d’un tiers. Les deux parties restant d’illustres inconnus pour l’individu, celui-ci restera indifférent du montant et de la façon dont cet argent sera dépensé. Ici, psychologiquement, l’individu ne rentre à aucun moment en contact physique avec les personnes concernées. Ainsi, ne mettant pas de visages aux participants, son empathie (en quelque sorte) sera effacée. Puisqu’il ne tire ni profit et ni satisfaction dans la transaction.
C’est ainsi que fonctionne les services publics, notamment les caisses d’assurances maladie (Ndlr. La Sécurité sociale), dont on sait au combien ils sont déficitaires. Sous couvert d’égalité on retrouve dans ces systèmes finalement de gros déficits appauvrissant et nivelant par le bas des populations qui ne sont plus maîtresses de leurs revenus. Générant de facto une dépendance au pouvoir politique.
3 –Le jeu de « l’Ultimatum » : une inégalité gagnante plutôt qu’une égalité perdante.
Ce qui revient à traiter une dernière théorie (parmi bien d’autres, il faudrait écrire un livre entier pour toutes les présenter). Qui est le jeu de « l’Ultimatum », qui est un biais cognitif intéressant dans le cadre d’une négociation notamment.
Le cas d’école est le suivant : une personne est chargée de répartir une somme d’argent avec une autre personne avec laquelle il ne peut pas interagir et qu’elle ne connait pas. Cette première est libre de choisir le montant. La seconde personne peut : soit accepter l’offre ; soit la refuser, dans ce dernier cas, cette somme d’argent sera perdue.
L’individu rationnel qui a le choix va toujours avoir tendance à maximiser ses revenus, il va proposer le partage le plus avantageux pour lui. L’individu receveur qui est censé être rationnel va malgré tout accepter cette répartition inégale du montant initial. Autrement dit, la Raison pousserait à ce qui ait deux vainqueurs inégaux plutôt que pas du tout.
Mais les expérimentations de ce jeu démontrent que les receveurs refusaient assez souvent les offres en dessous d’un certain montant (sur une échelle de 10 euros, cela donne 2 euros). Tandis que l’offreur préférait tempérer son appétit (en reprenant la même échelle, n’offrant non pas 1 euro, mais 4 euros).
Là comme pour la théorie des coûts irrécupérables, l’expérience des individus permet de corriger ce biais.
Mais au niveau macroéconomique cela est tout autre chose. En effet, c’est ce que les idéologies collectivistes essaient de gommer sous -encore une fois – couvert d’une égalité absolue dans la répartition des richesses. Or, si on suit le raisonnement de « l’Ultimatum » cela revient à dire que sous prétexte d’une inégale répartition des revenus, on préfère rejeter l’offre et finalement ne rien gagner que de remporter un montant, certes, inégalement réparti. Autrement dit, Une société égalitaire n’a pas de gagnants, seulement des perdants. Bien entendu, seul le pouvoir politique en sort vainqueur en asseyant son autorité.
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Ces biais cognitifs sont des défauts de la Raison, mais ils peuvent être corrigés par l’individu dans la pratique. Démonstration d’un Homme imparfait mais perfectible par l’expérience. En revanche, ces biais cognitifs deviennent dangereux lorsqu’ils sont utilisés par des entités institutionnelles ou/et collectivisées. Puisque la Collectivité refusera toujours d’admettre ses erreurs ou encore de redonner le pouvoir aux individus, à peine de disparaitre.