Billet – Big Brother dans votre voiture mais pas que…

Par Chuck Noel,

Adoptée en première lecture – et selon la procédure accélérée- par l’Assemblée Nationale, le projet de loi relative « à la modernisation de la Justice du XXI ème siècle » laisse dessiner de biens mauvais présages dans la garantie de nos Libertés Individuelles.

En effet, le législateur qui brasse déjà plus de 800 millions d’euros annuel en matière d’infractions au Code de la Route. Avec l’installation de plus en plus généralisée de radars, de règles stupides, comme la prise en compte par les conducteurs des considérations environnementales – à des années lumières du « comment fonctionne une voiture » – dans le cadre de l’examen du Code de la route.

I –Big Brother is watching inside your car.

On revient en force avec le contrôle de vitesse permanent dans nos habitacles, ainsi l’article 15 bis B du projet de loi dispose -pour un futur article L311-2 du Code de la route- que : « Les agents compétents pour rechercher et constater les infractions au présent code, dont la liste est fixée par décret en Conseil d’État, ont accès aux informations et données physiques et numériques embarquées du véhicule afin de vérifier le respect des prescriptions fixées par le présent code. »

Après Big Brother sur votre ordinateur, après Big Brother chez vous sous l’empire de l’état d’urgence, maintenant voici Big Brother dans votre voiture. Cette formulation laconique indique que désormais, le puissant État peut –au nom de la Sécurité routière, ou au nom du tiroir caisse (au choix) –  avoir accès aux données informatiques de votre voiture. Certains vont répondre que justement toute les voitures ne sont pas encore électroniques. Ce à quoi il faut leur rétorquer que l’État a pensé à tout en invitant l’automobiliste à changer sa vieille 4L pour le nouveau modèle de 206. Il n’y qu’à voir ce qu’il se passe à Paris dont la mairie souhaiterait interdire l’accès de la ville aux véhicules antérieurs à l’année 1997 : « Ayez une voiture électronique, ou marchez à pied. Ne vous inquiétez pas des caméras de surveillance dans chaque coin de rue veillent à votre sécurité. »
Ainsi, un moment d’égarement lors de votre conduite, par exemple un léger excès de vitesse en ligne droite par beau temps. Et bien Big brother vous le rappellera avec une jolie petite lettre avec le montant d’une jolie amende emballée avec le nombre de points que vous avez aussi perdu.

Et n’attendez rien du Conseil constitutionnel qui risque bien de valider ce dispositif lorsque le texte lui sera déféré. À titre d’illustration, il avait bien validé le dispositif de perquisition de nuit dans le cadre de l’état d’urgence. (QPC 2016-536).

II –Big Brother isn’t alone.

La surveillance dans nos voitures n’est que le plat principal, puisque le législateur nous a concocté tout un lot d’assortiments au cas où on arriverait pas à digérer cette mesure.

Ainsi, outre une mesure qui amoindrie l’écran protecteur de la personne morale. C’est à dire en imposant au représentant de la personne morale de communiquer le nom, l’adresse et toutes autres informations à la personne physique qui a commis une infraction – au Code de la Route – avec un véhicule de la personne morale. Afin qu’il soit sanctionné. Un appel à la délation, en somme. C’est toujours mieux que de permettre un règlement de ce genre de différend entre le salarié et sa hiérarchie à l’amiable. L’État aime les complications.

Mais les principaux assortiments consistent à tolérer la conduite sans permis ou encore sans assurance. Pour le second, vous allez me dire que cela pourrait être une bonne chose dès lors qu’on laisse le choix au conducteur de s’assurer ou non – à ses risques et périls. Mais cette -a priori- bonté cache une certaine perversion. En effet, la contrepartie, de l’atténuation de ce régime de détention du permis de conduire ainsi que celui de la possession d’un assurance auto, est la mise en place d’un montant d’amende déterminé à payer afin de pouvoir éteindre l’action publique. Outre l’aspect chantage de la chose et la mise à l’écart des automobilistes les plus pauvres, dont la principale infraction commise est le petit excès de vitesse. On assiste là, à une véritable fiscalisation institutionnalisée de l’infraction routière. « On arrête les poursuites si vous payez, x euros ». D’autant plus que même si l’extinction de l’action publique n’est qu’une faculté, en pratique la poursuite de celle-ci risque de n’être que marginale dans la mesure où la Justice est surchargée à l’heure de l’émiettement de son budget.

La disposition relative à la conduite sans permis, laisse ainsi apparaître au grand jour, le véritable dessein du législateur, qui n’est pas d’assurer notre sécurité, si seulement cela avait été le cas un jour, mais bien disposer d’une manne financière régulière. Puisqu’on valide le fait que quelqu’un puisse conduire sans avoir des connaissances minimales dans le fonctionnement d’un véhicule, pouvant réellement mettre en danger autrui. Le but du Contrat social est d’assurer sa propre conservation ainsi que celle d’autrui, l’existence d’un permis de conduire est légitime étant donné la relative complexité du fonctionnement d’un véhicule.

Si concernant le volet « fiscalisation » de la conduite sans permis et sans assurance, le Conseil constitutionnel pourrait invalider ce dispositif au nom de l’individualisation des peines consacrée implicitement par la Déclaration des droits de l’Homme et du Citoyen de 1789 (Article 8).

Il faut malgré tout noter, depuis maintenant plusieurs années la volonté du législateur d’étreindre nos Libertés individuelles, on ne parle plus de l’état d’urgence qui se prolonge, ni de la loi sur le Numérique, ni non plus de la Loi sur le Renseignement passée en 2015.

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