Par CorsicanLibertarian,
1) La soi-disant modernité du monétarisme :
Il est souvent dit que le monétarisme, par ses détracteurs comme par ses partisans, est une approche moderne en terme de vision monétaire où tous ceux critiquant la conception de Keynes et affirmant que les mouvements inflationnistes et déflationnistes sont provoqués par des changements dans la quantité et et la vitesse de la monnaie. Cette soi-disant modernité est en réalité une idée qui était déjà très largement entretenu par une grande partie des économistes ayant précédé Keynes.
2) Friedrich Hayek, debout contre les conceptions macroéconomiques :
Hayek, dans son livre Denationalization of money (traduit très récemment en français sous le nom de Pour une vraie concurrence des monnaies), dit clairement, avant le début de sa critique, qu’il est se range de l’avis des monétaristes lorsqu’ils disent que toute inflation est une inflation “tirée par la demande” et qu’il n’y a pas d’inflation “portée par les coûts” (sauf si on considère la décision politique de créer de la monnaie pour compenser une hausse des salaires, qui sinon, serait cause de chômage, comme une cause économique).
a)La méthodologie :
Cependant, Hayek s’oppose aux monétaristes, et notamment, à leur plus éminent représentant, Milton Friedman, tout d’abord de la même approche macroéconomique qu’ils partagent avec les keynésiens. Il déclare qu’une théorie monétaire n’a pas besoin d’une telle approche, et que si la macroéconomie peut fournir une approximation utile des faits et déclarer empiriquement des relations causales, elle bénéficie encore moins de la connaissance de certaines variables, qu’un niveau d’échelle inférieur est plus à même de discerner. Il préfère ainsi à la microéconomie à la macroéconomie, car c’est “une technique qui produit essentiellement ce qu’[il avait] nommé des “prédictions de structures” [pattern predictions], mais incapable de produire des prévisions d’évènements spécifiques, dont la macroéconomie se revendique capable, à tort à mon sens”.
b)La définition des biens monétaires :
Mais la différence entre Hayek et les monétaristes n’en reste pas là : la critique de Hayek est tout aussi cinglante envers la théorie quantitative de la monnaie. Pour Hayek, dans le cas où il existe des biens que les monétaristes considèrent comme monnaie et d’autre comme si ils n’en étaient pas. Ainsi le reproche fait par Hayek réside dans le fait que même lorsqu’il n’y a qu’une seule monnaie dans un pays, il n’y a rien de tel que LA quantité de monnaie et “que les efforts pour déterminer certaines catégories d’intermédiaires des échanges libellés en une seule unité comme s’ils étaient homogènes – ou de parfaits substituts – sont trompeurs, même dans les cas les plus simples.” La validité de la théorie quantitative est de ce fait encore plus affectée par l’existence de plusieurs monnaies sur un même territoire soumises au processus concurrentiel.
c) Le problème de la structure des prix plutôt que le problème du niveau des prix :
Cependant le principal problème de la théorie quantitative de la monnaie pour Hayek, est que celle-ci s’intéresse à la variation de la quantité de monnaie dans l’économie et à son effet sur le niveau des prix, et son attention est bien trop porté sur les effets néfastes de l’inflation sur la relation créancier-débiteur. Aucune attention n’est portée sur les conséquences les plus néfastes de l’inflation, à savoir que les injections et les contractions monétaires provoquent des modifications de prix relatifs entre les biens, ainsi que de mauvaises allocations de ressources et des mal-investissements. Ainsi, même une quantité constante de monnaie dans l’économie ne garantit pas que “les flux monétaires demeurent de même ampleur”. La masse monétaire, si l’on vise la stabilité des prix ou un niveau d’emploi durablement élevé, ne doit pas rester constante ou évoluer à un taux fixe ; pour cela, il est nécessaire que la quantité de monnaie, ou “la valeur agrégée de tous les actifs les plus liquides, reste à un niveau tel que les individus “ne réduisent, ni n’augmentent leurs dépenses en vue d’adapter leurs réserves aux variations de leur préférence pour la liquidité”, et pour cela l’offre de monnaie doit être d’une grande élasticité. Ainsi, seul le marché peut déterminer la “quantité optimale de monnaie”.
d) La proposition de Friedman au sujet de la politique monétaire :
Le professeur Friedman a également proposé, en son temps, d’inscrire via la loi un taux auquel la Banque Centrale aurait le droit d’accroître la masse monétaire. Hayek critiquera cette proposition en se demandant ce qui se passera, sous un tel système, si jamais la masse d’espèces en circulation approche la limite de ce nouveau taux et qu’un besoin nouveau de liquidités ne puisse pas être satisfait.
Comme l’a fait remarquer Walter Bagehot dans le Lombard Street, si une telle proposition s’appliquerait :”Supposons une certaine inquiétude sur le marché financier anglais ; dans ce cas, dès que la réserve s’approcherait de la limite légale, il se produirait une panique ; si la loi fixait un tiers du passif, dès que la réserve des banques tomberaient à ce tiers, une crainte désordonnée s’emparerait de tous se propagerait avec une violence extrême.”